Nazhun bint al-Qulaïy’i, dite Nazhun al-Gharnatiya, est une grande poétesse andalouse qui a marqué la littérature du XIIème siècle, au temps des Almoravides. Retour sur le parcours étonnant d’une féministe avant l’heure.
Malgré tout le fanatisme dont étaient accusés les Almoravides, surtout à leurs débuts dans le XIème siècle, leur époque fut l’une des plus actives sur le plan artistique et littéraire, notamment dans Al-Andalus et pour une ville-phare comme Grenade. Ibn Battuta décrit cette cité comme «la mariée d’Al-Andalus, sa plus belle ville, sans égal dans le monde ! Avec sa distinction, elle ne pouvait que donner naissance à des personnages distingués dont les poèmes ont été écrits en or…». La poésie était alors un art mixte, pratiqué par les femmes et les hommes, régulièrement mis en concurrence pour conquérir l’estime des sultans et des vizirs. Derrière la beauté des vers composés, la satire était un sous-genre non moins important ; parce qu’il servait alors de critique tant sociale que politique. Cet art à part entière était, bien entendu, nourri par les incessantes intrigues de cour qui ont bercé l’époque. Ce que les sources ont par ailleurs conservé de la vie de Nazhun al-Majina et de ses poèmes satiriques est surprenant par son abondance. La «diffamation» des personnages publics était largement utilisée par les femmes poètes, exprimant souvent des références sexuelles pour répondre à leurs adversaires. Leurs vers égalaient, et parfois dépassaient, la férocité de leurs homologues masculins. Nazhun bint al- Qulaïy’i, dite al-Gharnatiya, et sa poésie invective en sont un exemple quasi-parfait.
Par Myriam Alila
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