Au moment de l’Indépendance, les terres agricoles détenues par des colons européens représentaient un million d’hectares dans le territoire sous protectorat français, soit environ 15 %, et la partie la plus riche d’une superficie agricole de l’ordre de 7 millions d’hectares. Depuis les années 2010, le patrimoine foncier de la colonisation est entièrement détenu par des citoyens marocains. Il a fallu 60 ans pour que se fasse la marocanisation privative des terres coloniales.
Une succession de politiques étatiques à géométrie variable et d’initiatives d’acquisitions privées avaient été nécessaires pour qu’une marocanisation, commencée avec une prévalence de l’état dans la récupération des terres, aboutisse au transfert à des Marocains de toutes les terres coloniales. Tout au long du processus, l’option libérale avait dominé de façon plus ou moins explicite en dépit de tentatives pour un retour de ces terres aux agriculteurs sans terre. C’est cette longue histoire que rapporte cet article. Elle commence avec l’établissement des protectorats français et espagnol.
Les politiques du Protectorat
Il y a un peu plus d’un siècle, avec le régime des protectorats étrangers, le Maroc agricole entrait dans une économie dualiste qui confrontait un système de production traditionnel, essentiellement tourné vers l’autosubsistance, à une agriculture fondée sur des technologies plus productives, capitalistiques et orientées vers une nouvelle demande commerciale intérieure et extérieure. Ce secteur avait été créé par des colons européens sur des terres marocaines, accaparées ou spoliées.
Par Grigori Lazarev
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