Depuis le Moyen Âge, le Maroc traine d’une manière récurrente le débat sur l’appartenance/nationalité et la trahison/loyauté. Le choc des cultures résultant de la greffe européenne, à différents niveaux, y est pour beaucoup.
La nationalité marocaine est un concept récent, qui n’existe que depuis le Protectorat. Avant, les Marocains n’avaient pas d’état civil, ils étaient considérés comme des sujets du sultan, vivant sur une terre aux frontières floues : al-Maghrib al-Aqsa, qui faisait partie d’un ensemble plus vaste encore, Ard ou Dar al-Islam (la maison ou la terre d’islam). Le Maroc d’avant n’était pas exactement une nation, mais un ensemble de tribus, de fiefs et d’agglomérations imposables et «reliables» par le seul lien de l’allégeance et de la religion (les Marocains juifs ayant un statut à part de «dhimmis» ou protégés).
Il y avait aussi le cas particulier des tribus et des fiefs entrant régulièrement en dissidence et refusant de payer les impôts sultaniens, sortant ainsi du consens «national» et basculant pour des durées plus ou moins courtes au rang d’apatrides, voire de mécréants (aux yeux du Bled Makhzen). Ces domaines, essentiellement nichées dans les montagnes inaccessibles aux armées sultaniennes, vivaient dans une sorte d’autonomie/autarcie.
Le débat sur la nationalité, tel qu’on le connait aujourd’hui, n’avait donc pas lieu. Mais il y avait un autre débat, qui était lié à l’appartenance religieuse. La question n’était pas de savoir qui était Marocain, mais qui était musulman. La compétition se jouait à ce niveau. L’allégeance à l’islam, et la manière dont on le servait, était un diapason quasi-généralisé.
Par Karim Boukhari
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