Produit de son époque, qu’il aura tout autant marqué de son empreinte, Thami El Glaoui est un personnage fascinant et complexe, dont ne connaît pas tous les faits et gestes qui ont émaillé sa vie comme sa longue carrière politique.
Il y a eu le Glaoui (Thami) légendaire, le grand Pacha de Marrakech, le lord de l’Atlas, comme il fut appelé, l’ami de Churchill et de Charlie Chaplin, l’invité des noces de la reine Elisabeth, le grand esthète, bâtisseur du palais Stinia, qu’il voulait la réplique d’Alhambra, chef d’œuvre architectural. Mais aussi le grand collectionneur des manuscrits du Coran (désormais disponibles à la bibliothèque nationale), celui qui a introduit le golf au Maroc, protecteur des oulémas et parrain des artistes, qui avait à sa cour un grand poète pour chanter ses louanges, Ben Brahim, un chef d’orchestre égyptien du nom Zeghloul, dont un de ses fils est devenu un grand maître de la littérature française. Sans oublier l’art culinaire.
Le chaînon manquant entre Hassan 1er et Hassan II
Il y a tout autant une autre image, l’envers de la légende : le suppôt de l’administration coloniale française, le bourreau des nationalistes, le traitre à Mohammed V, celui dont on n’a gardé que l’image de prosternation à ras le sol devant Sidi Mohammed Ben Youssef, à Saint Germain en Laye, avant son retour triomphal au Maroc…
L’image légendaire s’éclipse devant le Glaoui historique. C’est un travail qui n’a pas été fait, et qui attend de l’être. Un des descendants du Glaoui a jugé nécessaire d’aborder le grand historien Laroui, pour se pencher sur l’histoire du grand pacha. Laroui s’est exclamé : «Moi ? Moi ?». Puis il a continué son chemin, sans prêter attention à la requête du quémandant. Il se serait déjugé, lui, fleuron du mouvement national. Or, la discipline de l’Histoire au Maroc n’aura atteint sa majorité que si elle se penche, objectivement, sur ces mal-aimés : les Glaoui, Abdelhay Kettani, Oufkir, et autres.
Par Hassan Aourid
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