Hassan al-Wazzan ne ressemblait en rien aux érudits de son siècle et de sa génération. Il a créé un genre à part, critique et lucide, qu’il a été pratiquement le seul à représenter. C’est sans doute pour cela qu’il a marqué son temps et que son œuvre reste d’une grande modernité.
Parmi les nombreux écrits historiques datant de l’époque de Hassan al-Wazzan, beaucoup sont consacrés aux saints et aux soufis. Le XVIème siècle marocain est, en effet, celui du soufisme, du maraboutisme et du tassawuf. Cette forme de littérature était en vogue et certains n’hésitent pas à la ranger dans le courant «populaire», au contraire du courant classique, dédié à l’historiographie officielle. Cette dernière à son tour, et à côté des récits de voyages et des écrits dédiés au fiqh islamique, était elle aussi dominée par le thème du soufisme. Tous ces documents avaient pour dénominateur commun la consécration et la glorification des saints, et la description du culte et de la baraka qu’on leur prêtait. Hassan al-Wazzan et sa «Description de l’Afrique» font donc figure d’exception (qui confirme la règle).
Contrairement à ses congénères, al-Wazzan a choisi de se détourner de ces sentiers battus. Il a emprunté d’autres chemins. Même quand il s’est consacré à un genre très populaire à l’époque, celui des traductions, il a fait fi des saints auxquels on prêtait tant de miracles, pour s’intéresser plutôt au parcours de 30 médecins et philosophes arabes, dans un précieux document qui ne nous est malheureusement jamais parvenu, et dont on ne connaît que le thème. Comme s’il voulait rectifier le courant de pensée général de son époque et aller à l’essentiel, que ses congénères ne décelaient pas forcément.
Par Ahmed Alwarit
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