Avant même son internationalisation officielle, Tanger a fait office de capitale diplomatique et de capitale tout court, quoique non déclarée, d’un royaume en pleine reconfiguration. Retour sur une époque mouvementée, avec ses mystères, ses énigmes et, surtout, ses hésitations entre tradition ancestrale et modernité européenne.
De toutes les villes de l’Empire chérifien, Tanger a quasiment toujours fait bande à part. On ne le répétera jamais assez. Sa condition géostratégique la rend vulnérable aux quatre vents des conquêtes. Ses murailles, ses bordjs, ses tours de vigie ou ses ribats ne lui ont assuré durant des siècles qu’un répit temporaire, et ce jusqu’au tournant du XXème siècle. Lorsque le sultan Sidi Mohammed III, à la fin du XVIIIème siècle, décide d’en faire une capitale officieuse, les légations étrangères n’ont d’autre choix que de s’installer dans la ville du détroit.
Pour l’Empire chérifien, cette décision fait d’une pierre deux coups. Tanger, d’une part, se remet en selle après un Moyen Âge léthargique. Ensuite, la présence des légations étrangères assure à la ville une certaine immunité diplomatique ; quelle puissance en théorie se hasarderait à s’emparer d’une cité aux ramifications internationales ? Même un certain Joinville ne pilonnera la ville qu’avec l’accord implicite des autres nations occidentales.
Dès 1790, donc, les légations des principales puissances de l’Ouest fleurissent littéralement dans les ruelles de la médina. Le consulat de France ouvre ainsi ses portes en 1795, précédant de trois ans celui des États-Unis. Suivront les autres légations et consulats européens. En tout état de cause, l’installation des représentations étrangères va faciliter les pourparlers et la signature de traités commerciaux bilatéraux, surtout après 1820.
Par Farid Bahri
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