Il faudra l’écrire cette nouvelle page, sur les relations maroco-françaises. Sereinement. Nous n’avons jamais, dans ces colonnes, cédé aux antiennes de la catastrophe, ni insulté l’avenir sur les relations maroco-françaises, conscients que nous sommes sur les liens historiques, mais surtout stratégiques entre nos deux pays. Nous n’avons jamais mâché nos mots, non plus, quand il le fallait, pour fustiger la petite politique des visas. La France elle-même a reconnu ses torts là-dessus.
Nous avons fait la part des choses, entre l’essentiel et le subsidiaire, le constant et le variable, le pérenne et le fugace. Et nous ne pouvons que nous réjouir de la visite du chef de la diplomatie française, M. Stéphane Séjourné, à Rabat et de sa forte symbolique.
Il est dit dans un adage français que quand les choses vont sans dire, elles vont encore mieux en le disant. Et le non-dit sur le Sahara a été exprimé, dans le style français, fait certes de nuances, mais de manière claire. Cela est réconfortant et encourageant pour donner une nouvelle impulsion aux relations des deux pays.
Le reste ne compte pas de ceux qui croient que le Maroc serait une «Algérie de substitution» et s’en font une raison d’être. Le Maroc est le Maroc, et il est normal qu’on souhaite que la France reste la France : une conscience universelle. On n’a ni à lui dicter une quelconque conduite, ni à exiger d’elle à se plier à un jeu d’équidistance.
Le Maroc n’existe pas par opposition à qui que ce soit, mais par continuum à son histoire à travers ce mariage que nous voulons heureux entre le substrat amazigh et l’apport andalou, et sa vocation stratégique de confluent de l’Occident et de l’Orient. Sur ces fondamentaux, il y a consensus. Le combat pour la marocanité du Sahara est un combat pour la marocanité du Maroc, c’est-à-dire par fidélité à son histoire et à sa vocation stratégique.
Le monde est en train de changer, et la France se doit de relire la carte du monde. Tout comme nous, Marocains. Nous n’avons jamais mis en doute, du moins chez ceux qui ont la tête sur les épaules, la place de la France, et nous souhaitons que la nouvelle France prenne conscience de ce que le Maroc pourrait lui apporter en Afrique, au Moyen Orient, voire chez elle, pour des rapports apaisés avec ses citoyens de confession musulmane. Il est fondamental, dans ce nouveau redéploiement des relations entre les deux pays, de se rappeler les fondamentaux, et parmi ces fondamentaux : cet outil qui nous a rendu la modernité familière, a restructuré notre structure mentale, et a dépoussiéré un passé rabougri, c’est la langue française. Il ne faut plus qu’à chaque coup de froid, on brandisse l’alternative de l’anglais ou de l’espagnol. C’est puéril. Le regretté Abdellah Stouky avait dit que le français est une langue seconde pour nous. Il n’avait pas tort. Bien sûr que l’anglais est la ligua franca, et nous devons l’apprendre, sans sacrifier un acquis.
Nous devons à coup sûr donner une nouvelle impulsion à la coopération culturelle et ne pas hésiter à faire appel à des coopérants qui pourraient être d’un grand apport dans ce grand chantier qui est l’éducation, au niveau du supérieur, pas que dans les matières scientifiques.
Une nouvelle page est ouverte entre le Maroc et la France. Il faut l’investir intelligemment et avec sérénité.
Par Hassan Aourid, conseiller scientifique de Zamane