Mohamed Belmahi n’a pas besoin de notes pour conter, dans le détail, l’insoupçonnée histoire diplomatique entre le Maroc et la Grande-Bretagne. Pourtant, celui qui nous reçoit dans sa demeure à Rabat, n’est pas historien. Mohamed Belmahi, qui a débuté sa carrière dans l’aménagement du territoire au sein des ministères, va devenir l’un des principaux diplomates marocains du début du nouveau millénaire. Après presque une décennie passée à Londres, il nous raconte minutieusement comment les deux royaumes s’engagent à renouer avec un passé aussi riche que précieux. Il revient également sur l’incroyable enjeu de notre relation avec l’immense Inde, qui avait tourné le dos à notre partenariat et à notre phosphate. Enfin, à la tête de l’ONMT (Office National Marocain du Tourisme), il revient sur l’entrée du secteur dans la modernité, sans oublier ses souvenirs d’enfance d’un Protectorat répressif. Passage en revue d’une partie de l’Histoire marocaine côté diplomatique…
Nous apprenons, par une communication du Palais de Buckingham, que le roi Charles III est atteint d’un cancer. Quelle est votre réaction à ce sujet, vous qui l’aviez connu alors qu’il était encore prince héritier de la couronne britannique ?
Cette actualité m’a peiné eu égard de l’affection que j’ai pour celui qui était, en effet, encore prince héritier lors de mon mandat d’ambassadeur du Roi au Royaume-Uni et que j’ai eu le privilège de rencontrer quelques fois durant les presque dix ans que j’ai passés à Londres (de 1999 à 2009). J’en garde le souvenir d’un homme hautement cultivé, soucieux de la protection de l’environnement, féru d’architecture et profondément moderne, tant il accorde une importance aux questions qui concernent l’avenir de son pays et du monde. J’ai beaucoup de respect pour l’admiration qu’il a toujours portée et manifestée pour feu le roi Hassan II et son fils, Mohammed VI. Celui qui est désormais monarque britannique avait compris depuis longtemps déjà les transformations profondes de la société de son pays et s’est posé, non pas seulement en chef de l’Église anglicane, mais aussi comme un homme qui a le devoir de comprendre la religion des sujets britanniques issus d’autres origines. Je sais qu’il a une profonde connaissance de l’Islam, preuve en est un célèbre discours qu’il avait prononcé à ce sujet en 1995 à l’Université d’Oxford, et qui avait alors fait grande impression. Je l’ai connu d’ailleurs à l’occasion d’une autre manifestation sur l’Islam qui s’était aussi tenue à Oxford, en 2005. Je peux également évoquer ses talents d’artiste peintre et me souviens d’une belle exposition où étaient présentées ses œuvres conjointement à celles d’un prince saoudien, fils du roi Fayçal. Je peux vous dire également que le roi Charles III porte un intérêt particulier à l’artisanat marocain, essentiellement celui lié au Zellige et plus globalement à l’art architectural islamique. Il a d’ailleurs créé une fondation qui est notamment dédiée à ce sujet. Tout cela dénote le caractère humaniste de ce roi, très proche de son peuple.
La communication sur son état de santé tranche avec le mode de fonctionnement sous le règne de sa mère, la reine Elisabeth II, qui était plus discrète sur ce genre de sujet.
Cela ne m’étonne pas vraiment venant du roi CharlesIII tant, comme je vous le disais, il est soucieux de la modernité et du changement de mœurs. Le monarque a probablement estimé qu’il est juste que son peuple sache la vérité sur son état de santé et c’est tout à son honneur. J’espère pour le roi une guérison prochaine. Nous avons le même âge et j’éprouve à son égard une sincère affection.
Propos recueillis par Sami Lakmahri
Lire la suite de l’interview dans Zamane N°159
J’attends la confirmation de la reconnaissance du sahara par la Grande Bretagne pour parler de bonne relation dplomatique entre les deux etats