L’Algérie veut relancer le Maghreb, sans exclusion ni exclusive. La nouvelle configuration sur laquelle l’Algérie planche, dont elle est le noyau dur, excusez le pléonasme, n’est destinée contre personne !
Il faut croire, dit-on en français. Car au regard de la raison, une telle assertion ne tient pas. On ne peut prêcher une chose et son contraire.
Il y a de cela quelques semaines, l’Algérie avait abrité, en grande pompe, dans le quartier huppé des ambassadeurs (Hidra ou Lbiar), la proclamation de la «République Rifaine». Tout y était, l’hymne, le drapeau, les armoiries, le récit et les orientations.
Voilà qui ouvre la voie à une nouvelle conception du Maghreb. Après celui des peuples, le Maghreb des Taifas. Libre désormais, pour chaque entité régionale avec un brin de spécificité culturelle, de proclamer son indépendance. Le bal est ouvert. Faites vos choix.
Chaouis, Touaregs, Ibadites. On ne parle pas de Sahara, car la position de l’Algérie est une «question de principe».
On ne veut pas raviver les plaies de Arjat, ces pauvres paysans de Figuig chassés de leurs exploitations agricoles, ni de la fermeture du gazoduc, voire la menace de l’Espagne, si par malheur, elle alimenterait le Maroc.
Est-ce ainsi qu’on veut gagner «le peuple marocain frère» ? Dans le discours officiel, l’Algérie n’a pas de problème avec le peuple marocain. Comprendra qui voudra.
Il est difficile, si le bon sens est la chose la mieux partagée au monde, de conjuguer l’appui franc et sans faille à la «République rifaine» et «l’unité du Maghreb». À moins d’une construction qui passe par une destruction… Alors bonjour les dégâts.
Amusons-nous, là où il y a une spécificité culturelle, linguistique ou doctrinale à alimenter la dissension, par caresser les égos collectifs, déterrer les blessures, grossir quelques faits…
La recette est facile depuis la conférence d’Helsinki en 1979, ou les révolutions de couleur. Alors on ne va pas jouer à qui mieux mieux. L’Algérie, autant que l’on sache, n’a pas d’idéologie aussi fédératrice que le communisme, ni des ogives nucléaires. Et pourtant, l’arme du soft power est venue à bout de l’Empire Soviétique.
Soyons sérieux, le Maghreb des Taifas est le non-Maghreb. Quand bien même on voudrait l’enrôler de bons desseins. L’enfer est pavé de bonnes intentions.
On peut ne pas être de bons partenaires. On peut être adversaires, ou tout ce qu’on veut, mais on se doit de se conformer à des règles éthiques. Et de bon sens. On n’y est pas. C’est dommage pour un pays dont la diplomatie faisait jadis école.
Ceci étant, bon vent au Maghreb des Taifas. Un naufragé s’agrippe à un naufragé, comme dit le proverbe arabe. Vous imaginez la suite.
Par Hassan Aourid, conseiller scientifique de Zamane