Contrairement aux idées reçues, la consommation de viande n’est pas exclusivement signe de richesse. Des documents indiquent par exemple que certaines tribus en ont fait leur aliment essentiel durant le Moyen Âge. Les Senhaja par exemple en consommaient quotidiennement accompagné de «lben», le lait caillé. Source importante de protéine, la viande était, selon les préceptes des religions musulmanes et juives, l’objet d’un rituel au moment de abattage. Ailleurs, la préciosité de la viande en fait un mets de choix, servi en abondance à l’occasion des fêtes ou des ‘mouna’ (repas gargantuesques servis en guise de bienvenue aux membres du Makhzen en expédition). Les viandes dites rouges sont généralement celle des moutons, brebis et agneaux. Les bovins quant à eux sont, à l’époque, beaucoup moins répandus. Plus au sud, la consommation de chameaux est plus courante. Les viandes blanches, très populaires, sont celles des poulardes et des pigeons essentiellement. Ces derniers sont l’ingrédient principal des fameuses pastillas, tous droits venus des cuisines andalouses dès le XVème siècle. Il n’est pas rare également de consommer l’autruche dont l’élevage est attesté durant cette période. Les produits dérivés sont également source importante de protéine. Lait, œufs et beurre font partie intégrante de la culture culinaire du Moyen Âge. Plus rare est la consommation de poisson. Les sources de l’époque mentionnent que la ville de Sebta est un haut lieu du commerce de poisson. Mais dans le reste du territoire, ce sont surtout les poissons d’eau douce qui sont pêchés puis généralement séchés pour garnir les réserves de nourriture. Cette denrée demeure assez discrète dans les assiettes de cette époque. La cuisson des viandes est assez homogène. A la toute fin du Moyen Âge, Léon l’Africain en fait une description remarquable lors de ses pérégrinations dans la ville de Fès au début du XVIème siècle : «À Fez, le rôti ne se fait pas à la broche. On construit deux fours l’un au-dessus de l’autre et l’on fait du feu dans le four inférieur. Quand le four supérieur est chaud, on y introduit les moutons entiers par un orifice pratiqué en haut du four, afin de ne pas se brûler les mains. La viande cuit très bien ainsi, prend une belle couleur et une saveur délicate, car la fumée ne peut l’atteindre non plus que les flammes trop vives. Cette cuisson à feu doux dure toute la nuit. On commence le matin à vendre cette viande. On vend tous les jours plus de deux cents ducats de beignets et de mouton rôti. Il y a en effet plus de quinze boutiques dans lesquelles on ne fait que cela toute la journée». Léon l’Africain décrit là probablement l’ancêtre des stands de restauration urbaine rapide dont la viande n’était pas réservée à une élite.
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