La pratique du culte des saints au Maroc porte une vérité et des légendes qui peuvent ébranler les certitudes de certains. Les marabouts judéo-musulmans existaient et existent encore.
En ces temps d’aggravation du conflit israélo-palestinien, de provocations religieuses et de haine réciproque entre musulmans et juifs pour leurs rivalités sur le lieu dit « Esplanade des Mosquées » pour les premiers et « Mont du Temple » pour les seconds, il est de bon aloi de rappeler certaines vérités qui peuvent ébranler les certitudes des uns et des autres.
Au Maghreb, et surtout au Maroc, le culte réservé aux saints est une pratique encore courante de nos jours. Cette particularité, si maghrébine, fait que les saints, juifs ou musulmans, expression d’une superstition poussée à l’extrême, honnis par les religieux conservateurs et les réformistes politiques, continuent de peser sur la vie sociale et parfois politique du pays. Ce culte des saints est tellement répandu et ancré dans la société marocaine qu’on puisse voir aujourd’hui des personnes cultivées et rationnelles, venues des grandes métropoles du royaume ou de lointaines villes israéliennes, se prosterner devant la tombe d’un homme ou d’une femme, décédés il y a plusieurs années, décennies ou siècles, pour obtenir sa bénédiction. Soit dit en passant, l’une des conséquences du départ massif de juifs marocains vers l’État hébreu est que l’État d’Israël possède aujourd’hui son grand marabout marocain, Israël Abehassera, dit « Baba Salé », enterré à Netivot, dans le désert du Néguev et devant lequel s’agenouillent beaucoup de fidèles dont certains sont de très hauts responsables de l’entité sioniste. Généralement, les saints marocains ne se partagent pas. Ils abhorrent la mixité dévotionnelle et restent dans le monoreligieux. Saint musulman d’un côté, marabout juif de l’autre, chacun reste chez soi avec ses pratiques et son cérémonial. Mais, et c’est aussi une autre particularité du Maroc, il existe aussi des marabouts judéo-musulmans qui étaient et continuent d’être respectés, vénérés et priés par les suiveurs de ces deux religions du Livre qui, aujourd’hui, se font la guerre au Proche-Orient.
Par Adnan Sebti
Lire la suite de l’article dans Zamane N° 49