Il n’a pas encore quarante ans, mais a déjà tant de choses à dire. Mohamed Mehdi Bensaïd, actuel ministre de la Jeunesse, de la Culture et de la Communication du gouvernement présidé par Aziz Akhannouch, nous accorde le temps de parler Histoire. La sienne d’abord, lui dont les parents ont longtemps milité dans les rangs de l’opposition à Hassan II, et qui l’a vu ensuite rejoindre les rangs du PAM. Il nous explique en détails les ressorts de cette trajectoire politique inédite et précoce. Celle du Maroc ensuite, et de son patrimoine, parfois menacé. L’occasion de revenir sur l’affaire du «zellige», énième épisode du feuilleton de l’hostilité algérienne, mais aussi sur les mécanismes de protection qui s’offrent au Royaume. Mohamed Mehdi Bensaïd n’omet pas de défendre son bilan en tant que premier promoteur de la culture marocaine, d’interlocuteur de la jeunesse et garant de la survie d’une presse sous perfusion de l’état….
Nous vous avons croisé à Essaouira en marge du dernier festival Gnaoua (du 22 au 25 juillet 2023) où vous étiez notamment en compagnie de Abdeljalil Bouzouggar, directeur de l’INSAP (Institut National des Sciences de l’Archéologie et du Patrimoine). Nous savons qu’une importante découverte archéologique est sur le point d’être annoncée, pouvez-nous nous en dire davantage ?
Nous devons attendre que la communauté scientifique valide les découvertes avant de pouvoir les annoncer. Ce qu’il faut savoir à ce sujet, c’est qu’en effet d’importants travaux archéologiques sont en cours à Essaouira et dans sa région. Vous connaissez déjà le potentiel d’un site comme celui de la grotte de Bizmoune dans l’arrière-pays d’Essaouira, où ont été découvertes les plus anciennes parures fabriquées par l’Homme. À peine un peu plus loin, vous trouvez le site historique d’Ighoud, dans lequel ont été déterrés les plus anciens ossements connus d’Homo Sapiens et puis, tout dernièrement, dans la région de Rhamna, des vestiges archéologiques ont fait l’objet d’une annonce le mois dernier. Les scientifiques considèrent d’abord qu’il y a une continuité et une évolution humaine sur ce territoire et aussi qu’il y a des possibilités de trouver des traces de présence de notre espèce encore plus ancienne que celles déjà découvertes. Mais nous devons laisser le temps aux spécialistes car dans ce domaine les processus de recherche peuvent s’étaler sur de longues périodes.
Cette riche actualité archéologique coïncide avec une période où le Maroc a considérablement rehaussé son niveau d’intérêt pour la promotion et la sauvegarde de son patrimoine. Quelles sont les actions de votre ministère visant à soutenir cette recherche archéologique ?
Nous souhaitons investir et s’investir au maximum de nos moyens la recherche archéologique. Concrètement, nous réfléchissons à la mise en place d’une annexe de l’INSAP dans la région d’Essaouira et dans d’autres zones du royaume à fort potentiel archéologique. Il faut accompagner la dynamique des chercheurs et des étudiants dans ce domaine car les perspectives de résultats sont très encourageantes. Notre intérêt n’est pas seulement porté sur les fouilles actuelles, mais sur tous les travaux capables de lever le voile sur des parties de notre histoire, essentiellement les périodes mal connues comme celle entre la Préhistoire et l’Histoire ou celles précédant l’avènement de l’islam au Maroc. L’idée est d’abord de prendre pleine conscience de l’incroyable richesse et diversité de notre patrimoine historique et d’ensuite tout mettre en œuvre pour accélérer les découvertes scientifiques. Grâce à nos partenariats avec d’autres administrations, notamment avec la Gendarmerie Royale dans les endroits plus reculés, nous faisons les efforts nécessaires pour continuer à être au service de cette noble cause. De même pour l’investissement de nouveaux matériels technologiques sur lesquelles nous misons beaucoup. À terme, nous voulons faire de l’INSAP une école modèle pour la recherche archéologique, non seulement au Maroc, mais aussi dans l’intérêt des pays de notre continent qui souhaite profiter de cette expertise que nous développons.
Propos recueillis par Sami Lakmahri
Lire la suite de l’interview dans Zamane N°153/154