«A l’époque, tout le monde se moquait de lui et le prenait pour un fou». Nous sommes à la toute fin des années 1970. El Haj Abderrazzak Mekouar, alors président du Wydad de Casablanca, évoque publiquement l’idée d’organiser la Coupe du monde sur le sol marocain. Najib Salmi, l’un des tous premiers journalistes sportifs du royaume, se souvient de la genèse de ce qui deviendra une obsession pour le Maroc. « Lors d’une interview, j’avais demandé au président du WAC comment lui est venue cette idée saugrenue. Il m’avait alors répondu : Je suis bien conscient que c’est une utopie, mais je voudrais simplement faire germer cette ambition dans nos cerveaux! ». Abderrazzak Mekouar est le profil type du dirigeant moderne, visionnaire et décomplexé. Il multiplie alors les coups d’éclat sportifs et médiatiques. C’est ainsi qu’à l’aube de son premier mandat de président en 1974, l’homme parvient à réaliser l’exploit de convaincre le mythique FC Barcelone de fouler la pelouse du complexe Mohammed V de Casablanca. Le meilleur joueur de l’époque, le Hollandais Yohan Cruyff, vient donc régaler les travées de « Donor » (Stade d’honneur, ancien nom du complexe Mohammed V). C’est un prélude à la montée en flèche de l’ensemble du football marocain. Deux années plus tard, en 1976, le Maroc s’offre en effet sa première (et unique) Coupe d’Afrique des Nations, gagnée en Ethiopie. Le football marocain règne alors sur la scène continentale. Mais le rêve d’organiser un Mondial semble loin, tant pour les dirigeants marocains que pour les décideurs de la FIFA. A l’époque, seuls deux continents se disputent l’honneur de recevoir la Coupe du monde : l’Europe et l’Amérique du Sud. Le reste du monde fait de la figuration. Il faut attendre l’année 1986 pour ébranler l’ordre établi. La raison vient une nouvelle fois des exploits atteints par les joueurs de l’équipe nationale. Au Mondial du Mexique, le Maroc devient le premier pays africain et arabe à franchir le premier tour. Cela ne laisse personne indifférent. Hassan II, conscient de l’intérêt politique d’un tel succès, organise des festivités en grande pompe en l’honneur des héros marocains. Dès lors, les rêves les plus fous sont permis. L’idée « saugrenue » de Mekouar refait surface et devient crédible. Le roi en fait même une affaire prioritaire et, au sein de l’appareil d’Etat, la candidature marocaine ne fait plus rire personne.
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