«Au petit matin du mercredi 2 juin, le chef du Front Polisario, Brahim Ghali, a reçu la visite du Président algérien, Abdelmadjid Tebboune, accompagné du général Saïd Chengriha, chef d’état-major de l’armée algérienne», cette information était assortie de la vidéo de l’événement. Un Président sans passé glorieux qui rend visite à un Président fugitif. Tebboune, poussé par Monsieur le Général, qui dicte et surveille la récitation du texte appris par cœur quelques heures avant d’accéder à la chambre où gisait, presque, le dénommé on ne sait plus qui, tellement il a emprunté d’identités, prend soudain de l’importance. Il a enfin quelqu’un devant qui il allait montrer sa stature.
Le Président du général tient à préciser que c’est l’avis aussi de Monsieur le Général, tel général qu’on ne voit pas, il était masqué, qu’on n’entend pas, car il n’a pipé mot.
«Tu es dans ton pays», dit le président au président. Effectivement, le président technocrate n’a pas compris le fond de cette phrase, Mohamed Ben Batouche et non plus Brahim Ghali, qui est somme toute, un pseudonyme de militant, est un algérien et non pas marocain encore moins un sahraoui.
Celui qu’on croyait sahraoui du Maroc, de la région des Rehamna, s’est révélé tout simplement une taupe algérienne glissée soigneusement dans l’organisation du Polisario pour fliquer ses supposés camarades.
Bien sûr qu’il est chez lui, dans son pays même, car, passeport à l’appui, il s’appelle bien, Ben Batouche de nationalité algérienne. J’ai bien sûr un différend politique profond avec le dénommé Brahim Ghali, mais j’ai mal accepté qu’un sahraoui, qui, quoi qu’en dise, doit représenter une frange de nos compatriotes de Tindouf, soit humilié et rabaissé de la sorte. Comment se fait-il qu’un président sans gloire, en mal de légitimité, il fut élu par 58% des voix des 40% de participation, sans compter les bulletins nuls, selon l’annonce officielle, vienne coiffer un militant sahraoui ? Brahim Ghali, enveloppé dans sa nouvelle identité algérienne de Mohamed Ben Batouche, dit à qui voudrait le savoir qu’il est devenu tout comme Abdelmadjid Tebboune un Président fantoche entre les mains de la gente militaire algérienne. Pourquoi donc l’on a insisté à montrer le chef du Polisario diminué et ridiculisé à ce point ? L’image, dégradante, que nous a donnée la télévision algérienne de Brahim Ghali, intubé, dans une posture de malade, voulait-elle dire que le chef du Polisario est désormais Ben Batouche algérien et non plus le Président des groupements sahraouis de Tindouf ? Sinon que signifie la phrase «Tu es dans ton pays» et après avoir regardé le Général comme pour demander l’autorisation, Tebboune ajoute, dans un dialecte algérien populaire et non pas diplomatique : «En vérité, tu m’as plu quand tu t’es rendu à la justice espagnole». Est-ce ainsi, dans les normes diplomatiques, qu’un président de la république s’adresse à un autre président censé être son égal ?
Deux présidents sans identités présidentielles, obligés de jouer des rôles avec un maximum de zèle devant un général droit comme une planche et gardant le silence absolu et donc le secret de la mise en scène et de ses concepteurs.
Qui cherche-t-on à humilier ? Tout en sachant que Ghali, était recherché par la justice espagnole, on l’a quand même jeté dans la gueule du loup en l’envoyant se soigner dans le pays ibérique. Mais une fois que le Maroc a dévoilé le secret, la phrase de Tebboune où il fait l’éloge de la bravoure de son homologue sahraoui, n’a pas traversé l’esprit des chefs de l’armée algérienne. Plus d’un mois alors que le malade se soignait et au lieu d’annoncer que Ghali n’avait pas peur d’affronter la justice, on a préféré le silence implacable celui de Monsieur le Général Chengriha. Pire, juste après avoir comparu devant les juges espagnoles on organise sa fuite d’une manière rocambolesque. Pour qu’au final viendra le Président Tebboune lui tapoter sur l’épaule et le féliciter pour son courage.
Ghali est en fait un pion, mais cette humiliation est à l’adresse des Sahraouis de Tindouf.
Par Moulim El Aroussi, conseiller scientifique de Zamane